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“Qui ne dit mot ne consent pas” : le consentement se transmet et s’apprend
Nina Osmond Publié le 19 janvier 2024
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aire boire une tasse de thé à une personne qui n’en veut pas, absurde ? De la sexualité au salon de thé, le consentement est un enjeu quotidien qui s’apprend.
Le consentement s’est imposé dans le débat public en 2017. Le vieux proverbe « Qui ne dit mot consent » est alors balayé par le mouvement #MeToo, né en 2007, mais réveillé dix ans plus tard par des actrices américaines qui dénoncent les viols, les agressions et le harcèlement sexuel infligés par le producteur Harvey Weinstein. Dans leur sillage, d’autres prennent la parole en France, avec #BalanceTonPorc. En quelques mois, des millions de messages inondent les réseaux sociaux. Depuis, le consentement s’écrit en grosses lettres dans les médias, sur les réseaux sociaux ou dans les salles de classe.
“La conversation : voilà ce qui fait des rapports sexuels bons et épanouissants”
Mais que veut dire au juste consentir ? À quoi consent-on ? Comment donne-t-on et retire-t-on son consentement ? Pour quels actes faut-il s’assurer du consentement de l’autre ? Ces questions se posent très concrètement lors d’une fête, dans l’intimité d’une chambre et même au quotidien. Et les réponses n’ont rien d’évident, surtout chez les plus jeunes, encore en pleine découverte de leur corps et de leurs désirs. « Des études sociologiques le montrent : le principal obstacle à une sexualité épanouie est l’absence d’une discussion de grande ampleur sur le sexe et ses enjeux, souligne la philosophe Manon Garcia, professeure assistante à l’université de Yale et auteure de La Conversation des sexes. “Dans le sexe comme dans la vie, le consentement, loin d’une barrière qu’on dresse pour se protéger, est d’abord un lien qu’on tisse. Consentir, c’est d’abord, et surtout, désirer son partenaire et lui dire, à chaque instant, ce qu’on veut partager avec lui. La conversation : voilà ce qui fait des rapports sexuels bons et épanouissants” résume la philosophe Manon Garcia.
Le consentement expliqué aux enfants
Prendre en compte le consentement dans tous les domaines de la vie est enseigné aux plus jeunes à travers des livres illustrés comme Touche pas à mon corps tatie Jacotte de Thierry Lenain et Stéphane Poulin (éditions Les 400 coups). Les auteurs abordent avec humour les baisers bruyants et baveux de la Tatie que redoute tant sa nièce, montrent qu’il est possible de dire « non » même à 5 ans.
livres illustrés comme Touche pas à mon corps tatie Jacotte de de Thierry Lenain et Stéphane Poulin. Image DR Les 400 coups
“Enseigner le consentement, c’est commencer par apprendre à l’enfant que son corps lui appartient et qu’il est en droit de refuser de simples bisous. En ayant conscience de l’importance du consentement, les enfants sont plus à même de comprendre que des attouchements sexuels ce n’est pas normal, qu’ils ont le droit de refuser”, explique Elis, membre de l’association de sensibilisation à la sexualité Sexclame, une association rennaise qui travaille sur les thématiques de genre, de sexualité et de plaisir en milieu scolaire. L’idée de Sexclame est de “déconstruire les préjugés, de lever les tabous et de protéger les jeunes en les informant en leur disant « qui ne dit mot ne consent surtout pas » ”. Sexclame voyage d’écoles en collège avec sa « sexothèque » ambulante, composée de bandes dessinées, de fanzines, et de livres sur la sexualité, les genres et le consentement.
“Donner autant d’importance au consentement permet aux enfants d’évoluer dans un cadre bienveillant »
On peut sensibiliser les enfants à l’importance du consentement dès le plus jeune âge. Julia Morin, responsable d’animation et directrice en accueil collectif de mineurs à Rennes, transmet la nécessité de s’assurer du consentement d’autrui à des enfants âgés de 6 à 8 ans : “ Donner autant d’importance au consentement permet aux enfants d’évoluer dans un cadre bienveillant. Les enfants intériorisent qu’il faut demander l’accord des autres enfants s’ils veulent se faire des câlins, ou se tenir la main.” Sans même parler de sexualité aux plus jeunes, leur transmettre le consentement, c’est leur apprendre à respecter les besoins et les envies des autres. “Un enfant inconfortable avec le contact physique peut développer de l’anxiété et fuir les relations sociales s’il sait que ses choix ne seront pas respectés”, ajoute Sonia Morin.
Le consentement des enfants pendant les fêtes de fin d’année
En période de fêtes, Mickaël, animateur social et socioculturel auprès d’enfants et d’adolescents, insiste sur l’importance de dire aux enfants, « qu’ils ne sont ni obligés de s’asseoir sur les genoux d’un inconnu, si ça les mets mal à l’aise, ni d’embrasser, prendre dans ses bras des membres de la famille ou des amis lors des fêtes ». Sensibiliser au consentement et respecter celui des enfants est essentiel pour « s’assurer de leur sécurité affective et émotionnelle tout en leur apprenant à respecter les limites des autres « .
Les ressources pour parler du consentement ne manquent pas. La vidéo sur le consentement et la tasse de thé disponible sur YouTube est une analogie répandue pour parler du consentement sexuel. On ne peut pas forcer quelqu’un à boire du thé, on peut dire non si on nous propose de boire une tasse de thé même si on avait accepté que quelqu’un nous en prépare une. La sexualité, c’est comme le thé : le consentement prime.
Dans une vidéo devenue virale sur Internet et déclinée à diverses reprises, le consentement est expliqué très simplement en comparant une relation sexuelle à une tasse de thé que l’on proposerait à quelqu’un. Crédit : DR